Le rémouleur
Par Jean de la Marck
Il n'y a pas si longtemps, vers 1990, passait encore dans nos rues le rémouleur.
Il poussait une charrette bizarre, montée sur deux roues de vélo et surmontée d'un auvent. Elle était équipée d'une meule actionnée grâce à un pédalier fait de deux longues planches. Il n'annonçait pas sa présence par un cri particulier. Pour cela il faut remonter aux années trente. Non, il sonnait à chaque maison et demandait s'il n'y avait rien à aiguiser : couteaux, rasoirs, ciseaux… Quand on lui en donnait, il calait sa charrette sur deux pieds, s'asseyait sur une petite planche ; genre strapontin, placé entre les bras de celle-ci et là, actionnait le pédalier qui faisait tourner la meule. Dans une gerbe d'étincelles, il rendait du tranchant aux ustensiles qui lui étaient confiés. Lorsqu'il avait terminé un couteau, il passait un doigt expert sur le fil du tranchant pour s'assurer du travail bien fait.
Maintenant, on ne le voit plus, il a sans doute cessé ses activités si pittoresques pour être remplacé par des aiguiseurs individuels.
Jean de la Marck