Le « Gold Star »
Par Jean de la Marck
Au départ, il y avait le charbonnage « Batterie et Violette » plus familièrement appelé Sainte-Marguerite. Ses puits d'extraction étaient situés à peu près dans le carrefour actuel de Fontainebleau. Au fur et à mesure des creusements de galeries, les stériles étaient transportés et versés sur un terrain limité par les rues Naniot et Naimette ainsi que le début, de ce qui sera plus tard, le boulevard Philippet. Plus l'exploitation prenait de l'ampleur, plus il s'avérait nécessaire de trouver un autre site pour déverser les déblais. C'est ainsi que le terril de Naniot fut envisagé. Pour le transport des terres, on installa un transporteur aérien, équipé de petites bennes suspendues que les habitants de l'endroit surnommèrent « les wagonnets ». Il passait au-dessus du terrain de déversement initial, puis, par deux ponts, il enjambait le boulevard Philippet et la rue Naniot pour aboutir sur le terril où il déchargeait sa cargaison. Pour nous, gamins, l'ancien terrain du charbonnage était un formidable terrain d'aventures.
Un jour de 1946, quelques copains du quartier Sainte-Marguerite, mordus de football, décidèrent de créer un club. Comme nom, ils voulaient quelque chose de percutant, quelque chose qui puisse briller, comme le « White Star » (club de Bruxelles) existait déjà, ils optèrent pour « Gold Star », en espérant le voir scintiller le plus longtemps possible au firmament du football. Il restait à trouver un terrain. Suite à un arrangement avec le charbonnage, ils purent disposer de notre terrain d'aventures qui, d'une espèce de terril, devint au fil du temps et au prix d'un nombre incalculable d'heures de travail un joli terrain de football, doté de vestiaires et d'une buvette. Du boulevard Philippet, il était seulement séparé par une étroite bande de terre, clôturée par du fil de fer barbelé. Pour y accéder, on entrait par un passage aménagé près du pont des wagonnets. Tout au bout d'une allée, longeant le terrain, on aboutissait à la buvette au fronton de laquelle était écrit en lettres d'or « Gold Star ».
Le club s'affilia à l'Union Belge des clubs de football, en championnat provincial, pour la saison 49/5O et devint le seul club à évoluer sur le territoire de la Ville de Liège, Pendant ce temps les « wagonnets » faisant toujours partie du décor défilaient vers le terril. Planté au milieu d'un quartier en pleine expansion démographique suite à la construction d'un habitat social, il était prêt à recevoir tous les gamins des environs, désireux de taquiner le ballon rond, malgré la présence du R.F.C LIEGEOIS.
À la fin de la saison 52/53, l'US Liège, club créé en 1909, évoluant également en championnat provincial, portant le matricule 40, est expropriée de son terrain des « Bons Buveurs ». Elle songe à fusionner avec un club ami, en l'occurrence, le Gold Star. C'est ainsi que naît la Royale Union Sportive Gold Star de Liège. La vénérable US Liège apporte un important contingent de joueurs et le Gold Star met ses installations à disposition des fusionnés. Ce club très familial ne fera que croître et embellir. Malgré un terrain qui souffre le martyre tant il est utilisé : trois matches chaque dimanche, deux le samedi, plus les entraînements chaque mercredi et vendredi, il ne ménage pas ses efforts pour la pratique d'un bon football. On y jouait tellement que l'herbe ne parvenait pas à pousser, à croire que les hordes d'Attila étaient passées par là. Hormis les quatre coins du terrain où il y avait un peu d'herbe, le reste était noir charbon. En hiver, c'était le bourbier, bains de boues noires garantis. En été, la sécheresse aidant, un nuage de poussière s'élevait à chaque attaque des petits hommes verts, comme familièrement appelés. N'empêche, ce terrain attirait l'attention des personnes qui passaient sur le boulevard Philippet. Qui de nous dans le quartier n'a jamais arrêté son véhicule, ne fut-ce qu'un instant, afin de regarder et d'admirer les évolutions des joueurs du Gold Star. Géographiquement, ce terrain était devenu un point de repère pour les personnes cherchant leur chemin dans le quartier.
Tout aurait pu se dérouler comme un long fleuve tranquille en progressant et assumant un rôle social et éducatif s'il n'y avait eu une menace d'expropriation. En cause, la construction d'un complexe sportif mégalomaniaque à Naimette-Xhovémont qui devait être équipé : d'une piscine et d'une patinoire couvertes aux dimensions olympiques, d'un hôtel pour sportifs, d'un hall omnisports et de nombreux terrains extérieurs pour la pratique du tennis, basket-ball, volley-ball, rugby, football et athlétisme. Bref, nos instances politiques étaient prêtes à recevoir les Jeux olympiques. Malheureusement ou heureusement la montagne accoucha d'une souris. Seule, une piste d'athlétisme fut construite sur le terrain du Gold Star, tel le centre sportif Naimette-Xhovémont actuel.
Heureusement, pour le petit club vert et blanc, il fut décidé d'aménager, au lieu dit de l'Arbre Rouge, trois terrains réservés pour la pratique du football ainsi qu'un bâtiment pour les vestiaires et la cafétéria. Ces terrains construits en terrasses dominent le carrefour de Fontainebleau et se situent rue Henri Vieuxtemps. Comme vous le constatez, on en revient toujours sur l'ancien site charbonnier. Bien installée dans ses nouvelles installations la RUSGS Liège n'a fait que progresser et embellir. Elle aligne en championnat 14 équipes de jeunes, avec les seniors cela fait donc 19 équipes au total. Excusez du peu ! C'est ainsi et toujours avec des joueurs formés sur les hauteurs de Naimette-Xhovémont, que le club put accéder deux ans de suite à la Première provinciale et à la Promotion. Une montée trop rapide a eu raison de notre petit club qui fidèle à sa tradition n'a pas voulu acquérir des joueurs extérieurs au détriment de ses finances. Après une année au sein de l'élite, il réintégra la Première provinciale.
Actuellement, notre petit club évolue en troisième division provinciale. Il fait partie intégrante de notre quartier, et coule des jours heureux dans son écrin de verdure. Puisse- t'il encore longtemps et longtemps servir de locomotive et d'exemple pour cette jeunesse qu'il sait si bien accueillir et diriger. Un grand Merci à la ROYALE UNION SPORTIVE GOLD STAR DE LIEGE.
Jean de la Marck